12 Novembre 2024 - Après-midi/Soir
On m'a mise dans le camion des pompiers. Je n'avais pas le droit de rentrer chez moi.
Je pleure. Je n'arrive pas à m'arrêter. Je n'arrive pas à respirer. On m'ausculte. La fumée peut faire des dégâts, me dit-on. Je réclame mes chats. Je pense à mes chats.
Les gendarmes arrivent. M'interrogent. Je demande s'ils ont vu mes chats. S'ils vont bien.
Je n'ai que ça en tête : est-ce que mes chats s'en sont sortis ?
On me dit que le feu est maîtrisé. Que je dois attendre que les gendarmes m'autorisent à revenir dans l'appartement. R. a été prévenu, il arrive. Mes parents ont été prévenus. Ils arrivent.
Le temps passe. Je finis par me calmer. Je retrouve une respiration régulière. Même un des pompiers arrive à me faire rire. R. est là. Il monte dans le camion. Je m'effondre. Je ne sais pas où sont les chats. J'ai peur.
On m'autorise à revenir dans l'appartement. On me dit de récupérer ce qui est récupérable, c'est à dire pas grand-chose. Du moins, à l'étage. Le feu n'a, heureusement, pas touché le RDC.
Je cherche mes chats.
Mon cœur explose quand je retrouve les quatre boules de poils cachées sous le placard de l'évier. Ils sont tous vivants. Effrayés, traumatisés, secoués, mais vivants, putain.
R. et moi avons beaucoup de mal à les déloger de leur cachette. Nous sommes obligés de casser une partie du meuble. Nous les sortons un par un, et les mettons dans la voiture.
D'abord, Ko. elle se laisse presque faire. Elle râle, elle feule, elle tremble, mais j'arrive à la maintenir.
Ensuite, B. C'est un peu plus compliqué mais elle a eu tellement peur qu'elle se précipite dans mes bras.
Arrive Ki. Elle est prostrée. Nous n'arrivons pas à la faire sortir. Je dois utiliser le manche d'un balai pour la pousser vers R., qui finit par la prendre.
Il reste C. Rien à faire. Nous ne parvenons pas à le faire bouger. Il est apeuré, presque agressif. Je finis par le saisir par la queue, et, même si cela ne me fait pas plaisir : je tire. Il est là. Enfin. Le petit dernier.
Une fois les chats dans la voiture, nous partons de l'appartement.
En attendant mes parents, on me propose, au boulot de R., de prendre une douche. Ses collègues sont choqués par cette histoire, et le sont d'autant plus en me voyant. Ils sont plein de sollicitude mais je n'arrive pas vraiment réagir.
Ce n'est qu'une fois devant un miroir que je comprends.
Je suis recouverte de suie. Mon visage, mes bras, tout ce qui était exposable est noirâtre. Je présente aussi des bleus et des saignements (dus à les résistance des chats pour leur sauvetage).
Sous la douche, je suis partagée entre soulagement et souffrance. L'eau qui ruisselle sur moi est infiniment agréable, mais le savon me fait découvrir où je suis coupée/griffée, mais mes frictions me font découvrir où j'ai des bleus.
Nous serons logés chez mes parents. Pour l'instant. On va habiter leur petite dépendance dans la cour.
R. était encore de garde. Je suis arrivée sans lui.
On ressasse la journée avec mes parents. Je ne me rends pas compte. Je ne réalise pas.
Oui, j'ai compris que mon appartement avait brûlé mais.. est-ce bien réel ?
Je revois les flamme sous ou sur mon bureau. Je ne sais pas vraiment. Je revois la fumée. Je ressens encore la panique qui s'est emparée de moi. J'ai encore peur. A cet instant, je ne sais pas vraiment pourquoi, mais j'ai toujours peur.
Je suis persuadée que cette nuit, je ne trouverai pas le sommeil. Ou le sommeil ne me trouvera pas.
Lorsque je me retire dans le petit studio, je cherche mes chats un à un.
Chacun s'est trouvé une petite cachette, pour panser sa peur.
Sauf Ko. qui est vautrée sur le lit telle la reine qu'elle a toujours été. Elle me regarde, un peu avec dédain, comme pour dire : "T'es vraiment qu'une grosse trouillarde, toi."
Chacun a droit à son bisou. Chacun a droit à sa pâtée. Et je les regarde avec plus d'amour que je n'en ai jamais eu pour eux.
OK. Mon appart a cramé. J'ai perdu pleins de choses.
Tout ce que je retiens, c'est que je n'ai pas perdu l'essentiel.
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